Un article sur la soi-disant neutralité de l'information, en regardant qui sont les invités de l'émission C dans l'air souvent considérée comme indépendante, objective, équilibrée... et qui en fait ne l'est pas du tout.
extrait:
Il existe une imposture fondamentale inhérente au système médiatique à laquelle il faut tordre le coup et que je nommerai « l'idéologie de la neutralité ». Quatre acteurs sont en présence.
- le journaliste : neutre et au fait des grands débats qui animent la société ; il est à même de poser les bonnes questions à ses interlocuteurs.
- le politique : engagé et partial ; la défense de son idéologie l’entraîne à user de la rhétorique, du mensonge ou de la mauvaise foi à des fins électoralistes.
- l'expert : impartial et compétent ; il fonde sa légitimité sur le travail scientifique. Il ne prend pas parti.
- l'électeur : ignorant des grands enjeux du monde, il faut tout lui vulgariser.
De cette typologie largement intériorisée, on déduit l'interchangeabilité des experts et des journalistes entre eux. Bien évidemment il n'en est rien. Ni l'expert ni le journaliste ne sont des acteurs « hors sol » : nous parlons bien de sciences sociales et non de Science. Les « experts » ne sont pas des « savants ». Il y aurait beaucoup à dire sur la poignée d'éditorialistes et de commentateurs qui hante en permanence radios et télévisions. Est-ce par facilité que les rédactions contactent toujours les mêmes personnes? Est-ce par relation? Est-ce par idéologie ou à l'inverse par naïveté? Nous nous en tiendrons à ce constat : comme tout un chacun, les « experts » portent en eux une certaine vision de l'Homme et de la société. En ce sens, ils sont engagés malgré eux. Yves Calvi, récemment élu journaliste le plus indépendant de France (3), est bien placé pour le savoir. C'est à l'émission C dans l'air que l'on observe ce fait le plus aisément : l'expert est in globo au service des idées dominantes.
Voici les résultats de notre étude statistique:
En prenant pour objet d'étude les 21 émissions C dans l'air qui ont traité d'économie entre le 11 août et le 12 octobre 2011, on obtient ces données. Par position politique, on entend proximité de parti. Par position économique, le rapport au libre échange. « Mondialiste » signifie donc que l'invité considère qu'il faut s'adapter aux conditions internationales de commerce. A l'inverse le terme « sceptique » rassemble ceux pour qui il faut envisager de revoir ces mêmes conditions. A noter que « sceptique » ne veut pas dire « protectionniste » puisque les altermondialistes en général n'en sont pas partisans.
L'émission rassemble chaque soir 4 invités, soit 84 intervenants potentiels pour les 21 émissions qui nous concernent. Première remarque : il n'y a eu que 39 invités différents. (La liste est disponible en annexe de même que les fréquences de passage et les opinions politiques et économiques)
Deuxième observation : les déséquilibres sont frappants. Des 14 personnalités les plus invitées, Renaud Dély est le seul intervenant classé au centre gauche. Les 13 autres se répartissent entre centre, centre droit et droite. Tous sont par ailleurs assez favorables au libre échange et aux cadres déjà existants de l'Union européenne, de l'Euro et de l'OMC. Sur les 39 invités de la période, un seul est une femme (Raphaelle Bacqué).
L'organisation du consensus
Elle est au cœur de l'idéologie néolibérale.
De même que Boltanski et Chiapello ont constaté la disparition des termes de « hiérarchie » et d'« autorité » au profit de ceux de « projet » et « réseau » dans les techniques managériales modernes, l « expert » et l' « économiste » ont aujourd'hui remplacé les penseurs et les militants. Et puisque c'est désormais la connaissance qui gouverne nos élites et non plus les grands récits humains, l'économiste libéral est ainsi devenu un économiste tout court.
Chomsky et Herman ont bien observé la capacité de la finance, des gouvernements et des entreprises à peser sur certaines questions plutôt que sur d'autres afin de forger l'opinion à leur volonté. Ce fût le cas lors des interventions américaines au Cambodge, au Salvador et en Irak - dont la justification reste un modèle de propagande extrêmement abouti. Le procédé est fulgurant, il repose sur l'élimination pure et simple de l'alternative.
Mercredi 14 Septembre 2011, sur le plateau de C dans l'air.
Question d'un téléspectateur :
Y.Calvi - Le seul enjeu de 2012 ne doit-il pas être la réduction de la dette française et les moyens proposés pour y arriver ?
N.Baverez: - Oui
N.Beytout: - Si
J-P.Gaillard: - Bah oui !
P.Dessertine: - Bien sûr...C'est bien tout le problème
Y.Calvi: -Tout le monde est d'accord ?
J-P.Gaillard: - Mais il faut le faire! c'est comme les grecs.
N.Baverez: - Il n'y a pas d'alternative (sic) au désendettement de l'Etat pour des raisons économiques et financières, mais aussi pour des raisons politiques parce que c'est l'indépendance du pays. [...] compte tenu de ce qu'il se passe aujourd'hui malheureusement, l'incapacité de la classe politique française à proposer des baisses de dépenses, l'incapacité à proposer des privatisations exactement comme en Grèce, je crois que la dégradation de la dette française [...] extrêmement probable dès aujourd'hui.
article entier:
http://lespoir.jimdo.com/2011/10/31/calvi-l-ind%C3%A9pendant/